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samedi 4 juin 2011

Bac S 2012 : plan détaillé d’un sujet probable de philosophie La science parvient-elle à la vérité

Bac S 2012 :

plan détaillé d’un sujet probable de philosophie



Par Laurence Hansen-Love, professeur de philosophie à Paris et auteur du site hansen-love.

Le sujet : La science parvient-elle à la vérité ?

Le corrigé

Introduction
On admet volontiers que la science produit des vérités, et on a raison de le faire. Quand des propositions ou des thèses établies par une science selon un protocole précis et rigoureux sont contestées au nom de l’opinion ou du préjugé, on sait, bien sûr, que la vérité doit se trouver du côté de la science. Pourquoi ? Parce que les vérités énoncées par les sciences font l’unanimité (l’unanimité des savants, dans un premier temps) et parce qu’elles font leurs preuves étant donné leur efficacité ; les prévisions scientifiques sont fiables, la médecine scientifique, par exemple, nous apporte assez souvent la preuve de sa validité et de son bien-fondé. Faut-il pour autant en déduire que la science "parvient à la vérité" ? Pour cela il faudrait que la vérité soit comparable à un lieu, un espace, un abri, où l’on puisse séjourner. Cette représentation présuppose que la vérité existe, donc préexiste à la recherche comme si elle était une réalité, une "chose en soi". Ce présupposé nous semble très contestable.

Plan détaillé
I – Parvenir à la vérité semble être l’objectif de la science
Mais cet objectif est aussi celui de la philosophie. En quoi la science se distingue-t-elle de la philosophie de ce point de vue ?
a) On sait que science et philosophie, à l’origine, sont étroitement liées (cf. l’Académie de Platon : "Que nul n’entre ici s’il n’est géomètre"), puis vont se différencier peu à peu, mais conserveront toujours en commun cet objectif : tendre vers la vérité.
b) La philosophie est "recherche et amour de la vérité". Cela signifie qu’elle n’atteint pas la vérité, car si elle l’atteignait, elle cesserait d’être (cf. "Toute vérité est fausse dès lors qu’on s’en contente", Alain). La philosophie a pour objet l’"être en tant qu’être" (Aristote).
c) Tandis que la science ne s’occupe que d’un secteur de l’être (l’être en tant que ceci ou cela). Donc la science ne "détient" pas la vérité, mais cherche à établir des vérités dans un domaine restreint (les nombres et les figures, par exemple).

Conclusion :
rechercher la vérité n’est pas le propre de la science. De plus, poursuivre la vérité est une chose, l’atteindre en est une autre !

II – Les sciences établissent des vérités
Mais on ne peut dire pour autant que la science "parvient à la vérité", voici pourquoi :
a) Il ne faut pas dire "la" science, mais "les" sciences. Chacune a ses méthodes, son langage, ses critères de vérité. La vérité en médecine, ce n’est pas la même chose que la vérité en maths ou en logique.
b) Il ne faut pas confondre vérité et certitude. Les sciences exactes parviennent à des certitudes. Mais ce sont des certitudes partielles (propres à leur objet), provisoires (cf. remaniement constant des modèles scientifiques) et surtout négatives (chaque progrès scientifique permet d’éliminer une erreur.
c) Les sciences sont d’autant plus fiables qu’elles sont plus abstraites et formelles. Le "plus de rigueur" se paie en "moins de sens". Ainsi les maths et la logique ne détiennent pas des vérités, car elles constituent des architectures symboliques autonomes : en maths, "l’absolue rigueur a pour corrélat l’absolue insignifiance" (René Thom). Les maths ne détiennent pas la vérité, la logique ne détient pas la vérité : ce sont des "axiomatiques".

Conclusion : les sciences sont un modèle de rigueur pour toute recherche visant la vérité. Pourtant elles ne "parviennent" pas à la vérité, car la vérité n’est pas située quelque part, elle n’est pas ailleurs que dans le rapport entre l’esprit et le réel : "La raison ne voit que ce qu’elle produit elle-même selon ses propres plans." (Kant, Critique raison pure, préface.)

III – La vérité est une "fiction" cohérente et significative en science comme en art comme en philosophie
"La science est un conte de fées comme les autres", Paul Feyerabend (attention : ceci est une boutade, il y a un peu de provocation dans cette formule).
a) Les sciences élaborent des systèmes de "fictions" qui offrent une représentation cohérente et efficace de réel. Les sciences permettent d’agir sur le monde. En ce sens, elles disent la vérité.
b) "La raison est la science même", Bachelard. Cela signifie que la vérité est en progression constante. C’est un processus et certainement pas un lieu que l’on pourrait atteindre, une clairière ou un plateau sur lequel on pourrait s’installer ; la vérité n’est pas la réalité (un espace existant quelque part), donc on ne peut pas y aller. La vérité est une composition humaine, une composition précaire.
c) La représentation du réel élaborée par la science n’est pas la seule possible. Elle peut même être contestée au nom de la qualité (Nietzsche : la science nie les différences qualitatives) ou au nom de la vie (Michel Henry) ou de la pensée (Heidegger : "la science ne pense pas").

Conclusion :
le chercheur peut parler de vérité "comme une limite idéale de la connaissance que l’esprit humain peut atteindre. Il pourra appeler cette limite idéale la vérité objective" (L’Évolution des idées en physique, Einstein et Infeld).

Conclusion générale
La science ne parvient pas à la vérité. Parce que la vérité n’est pas un lieu, une plate-forme où séjourner. Si c’est quelque chose que l’on cherche à atteindre, ce n’est qu’un horizon, une perspective. En revanche, la science élabore et dit la vérité, avec plus ou moins de certitude selon les domaines. Toujours est-il que par le consensus qu’elle atteint, elle peut être considérée comme fiable. Toujours plus fiable que les discours qui ne relèvent pas du rationnel et qui ne sont étayés sur aucune preuve ni aucune argumentation susceptible de recueillir l’unanimité de la communauté des savants et des hommes de bonne foi.
Source : www.leutudiant.fr

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